Lente et lourde est la torpeur de celui qui ferme les yeux pour s’engager sur la voie du sommeil.

Aux bruits ambiants de plus en plus lointains succéderont bientôt des saccades de guitares, bruyantes et métronomiques. Trois cerbères à six cordes saturées, gardiens d’une direction dont on ne peut désormais plus dévier ni s’échapper.

Procession vers les profondeurs, descente inexorable au rythme de grosses caisses, le martèlement s’intensifie à mesure que se rapprochent les portes. Celles du subconscient qui brutalement ouvriront grands leurs battants, ordonnant à l’onirique le plus clément de s’effacer au profit des ténèbres, royaume de souffrances et de terreur.

Alors, il sortira.

Le Baku.

Créature fantastique, l’endormissement favorise son épanouissement. Songes colorés et cauchemars effrayants sont sa nourriture.

Perdu dans ces sphères d’émotions jusqu’alors terrées dans le subliminal, l’esprit est devenu captif de voix qui commandent à l'humain de s’enfoncer encore plus, de faire face à ses démons dont il ne connaissait pas l’existence.

Dans ce monde où le désir de fuite est annihilé, perdu dans des bourrasques d’afflictions, son hurlement ne peut s’entendre. Arrivé au bord du gouffre abritant le vortex hypnotique d’où les riffs se métamorphosent, où les cordes se croisent, se mêlent pour ne former qu’un, puis se libèrent, le plongeon définitif auquel vocifèrent les voix avec toujours plus d’insistance n’est plus qu’à un pas. Le vrombissement continu de la basse craquèle le sol à le délier sous ses pieds, le plongeon dans les entrailles est inéluctable.

Soudain, le silence.

Brusque et inattendu. La tourmente métallique s’est brutalement tue pour faire place au réveil, à la persistance des dernières notes ignescentes et à l’oscillation de cymbales, fantômes auditifs qui s’estompent puis s'éteignent.

Viennent alors les questions, celles sans réponse. Interrogations sur ses sensations enfouies, sommeillantes aux fin-fonds de la conscience, épanouies dans celles des rêves. Sondées dans de longues transes musicales aux multiples trappes et strates, qui l’ont rassuré autant que molesté.

Le Baku a, quant à lui, disparu. Pourtant, sa présence se fait encore sentir.

L'impression diffuse et presque palpable qu’il est encore là.

Que, régulièrement, il pourra se manifester et ramener dans le réel les souvenirs fugaces d’un monde irréel pourtant exploré en détails.

Et dès la prochaine plongée dans le sommeil, miroir grossissant de l’âme, il reviendra.

ABSENCE OF COLORS est un duo batterie & guitare à l’esthétique proche du post-rock, influencé par des groupes tels que Mogwai, Isis ou encore Tool.

Originaire de Chambéry, le groupe sort son premier EP (cycles) à l’automne 2022 et donne ses premiers concerts.

Produit par la compagnie WEIRD NOISE, Absence of Colors propose une prestation scénique singulière. Le projet s’articule autour d’instruments préparés qui offrent des outils d’improvisation sur mesure : capteur, looper, lumières asservies… Une performance composée à partir d’outils numériques développés pour l’occasion.

Ce premier live fait la part belle à la lumière et livre un live puissant, aérien et entêtant…